La liberté de déplacement des élus :
Pour l’exercice de leurs fonctions, les représentants du personnel peuvent, durant les heures de délégation, se déplacer hors de l’entreprise. Ils peuvent également, tant durant les heures de délégation qu’en dehors de leurs heures habituelles de travail, circuler librement dans l’entreprise et y prendre tous contacts nécessaires à l’accomplissement de leur mission, notamment auprès d’un salarié à son poste de travail, sous réserve de ne pas apporter de gêne importante à l’accomplissement du travail des salariés, (C. trav., art. L. 2315-14).
Définir la notion de gêne importante :
La notion de gêne importante n'est pas préciser par le Code du travail, les tribunaux l'apprécie au cas par cas. Exemples de gêne importante : Contacts fréquents d'une durée longue avec plusieurs salariés entraînant une baisse de la productivité, des entretiens avec plusieurs salariés travaillant au contact de la clientèle pendant une période de pointe de l'activité. En revanche, le fait de distribuer un questionnaire ou un document d'information sur les activités sociales et culturelles ne constituent pas une gêne importante.
Limites à la liberté de circulation des élus :
L'employeur ne peut exercer de contrôle sur la nature et sur les modalités du déplacement, il ne peut pas interdire l’accès à certains locaux de travail, néanmoins, il existe des limites à la liberté de circulation. En effet, au nom de la sécurité, l'employeur peut exiger que les membres de l'institution représentative du personnel se conforment aux règles d'hygiène et de sécurité applicables à tous les salariés dans l'entreprise. Il peut à ce titre fixer certaines modalités de déplacement visant à assurer la sécurité des salariés. Rien n'interdit par exemple à un employeur de demander aux membres du comité d'entreprise de circuler dans l'entreprise avec leur bon de délégation Cass. crim., 10 janvier 1989, n° 87-80048.
Récemment une nouvelle décision confirme cette limitation. Dans certains cas dans les entreprises où la sécurité et la confidentialité sont définies par un accord, les représentants des salariés peuvent voir leur liberté de circulation contrainte et contrôlée par l’employeur, dans certaines zones particulièrement sensibles Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 9 juillet 2014, 13-16.151. Dans cette affaire, rendue le 9 juillet 2014, un accord précisait que les salariés mandatés avaient accès aux zones confidentielles dans le cadre des procédures d'accès applicables aux salariés autorisés. La question était donc de savoir si l'employeur commettait une entrave à la liberté de circulation des représentants du personnel en les soumettant aux mêmes restrictions de déplacement que les autres salariés de l'entreprise.
La Cour a jugé que la procédure « avait pour seul objet de s'assurer de l'appartenance du salarié à l'établissement et de son statut de représentant du personnel » et que le responsable de cette procédure ne disposait « d'aucun droit de regard sur l'opportunité de la demande d'accès » puisqu'il devait y faire droit dès lors que l'identité était reconnue.
La Cour en a donc déduit que la procédure, « justifiée au regard du caractère hautement confidentiel de ces zones », ne méconnaissait pas la liberté de circulation des représentants du personnel dans l'exercice de leur mandat.
Déplacement des suppléants dans l’entreprise ?
La loi associe la liberté de déplacement aux heures de délégation. Aussi, un suppléant qui remplacerait un titulaire absent pourrait prendre les heures de délégation du titulaire absent et la liberté de déplacement qui va avec.
Un suppléant qui ne remplace pas un titulaire absent et qui n’a pas d’heure de délégation peut tout à fait, en dehors de son temps de travail, circuler dans l’entreprise, y rencontrer des salariés y compris à leur poste de travail, à condition de ne pas apporter de gêne importante à l’accomplissement de leur travail ou tenir des permanences.
Limites du contrôle par l'employeur :
L'employeur ne peut pas mettre en place un système d'autorisation tellement complexe qu'il décourage la libre circulation des élus dans l'entreprise. C'était le cas dans cette affaire, l’accès à certains locaux nécessitait l'autorisation de haut responsables hiérarchiques ne permettant pas un accès immédiat au locaux, Cour de Cassation, Chambre criminelle, du 15 novembre 1994, 93-85.070.
Un système de contrôle d'accès à des établissements (badge électronique,verrou à code secret, carte à puce, etc.), ne peut pas entraver la liberté d'aller et venir des salariés représentants du personnel dans l'exercice de leurs fonctions Cour de Cassation, Chambre criminelle, du 28 juin 1994, 93-82.824.
Impossible pour l'employeur d’obliger les élus à remplir un ordre de mission avec la mention "accordé ou refusé", Cour de cassation, criminelle, Chambre criminelle, 5 mars 2013, 11-83.984.
Conseils : Préciser les modalités de circulation dans l’entreprise en négociant un accord collectif ou dans le règlement intérieur du comité d'entreprise.