Une activité sociale ne peut être financée par le budget de fonctionnement :
La subvention de fonctionnement ne peut pas, sauf exception légale, être utilisée pour financer les activités sociales et culturelles du CSE. Un CSE auquel une société a fait croire que certaines prestations de loisirs pouvaient être financées sur le budget de fonctionnement peut faire annuler le contrat conclu avec celle-ci.
Le budget de fonctionnement attise la convoitise de certaines sociétés prestataires de services auprès des comités. Il n’est pas rare qu’elles proposent des contrats, présenté souvent comme un outil de communication, contenant des prestations qui devraient, en tout ou partie, relever du budget des activités sociales. “Pas de problème, c’est bien sur le budget de fonctionnement”
Certains commerciaux profitent de l’inexpérience de nouveaux élus pour proposer aux comités des contrats se décomposant en plusieurs prestations en affirmant que ces dernières et le prix forfaitaire proposés sont entièrement imputables sur la subvention de fonctionnement. La plupart du temps, le comité social et économique se laisse convaincre, il croit ce qu’un professionnel lui dit.
Comme nous le montre une affaire jugée par la cour d’appel de Versailles, le prestataire qui trompe volontairement un élu du CSE n’est pas à l’abri d’ennuis juridiques et pourrait dire adieu à son contrat et à sa facture.
Un contrat imputé sur la subvention de fonctionnement :
Dans une récente affaire, un comité d’entreprise a signé avec la société ALTER CE, connue sous l’enseigne Comitéo, un contrat de service sur la mise à disposition d’un logiciel dénommé « Plateforme et programme Comitéo », proposant un outil de gestion et de comptabilité. La description et le coût de l’offre sont ainsi libellés :
– Offre de base : plate-forme Comitéo optimum (1 200 euros), licence fixe (2 070 euros), licence utilisateur (2 380,50 euros) ;
– Module optionnels : billetterie, avantages et bons plans (offert), forfait logistique (2 104,50 euros)…, gestion des ASC et de comptabilité (néant)…
Le contrat est conclu pour une durée de 3 ans et demi et la facture, payable en trois fois sur 2016, 2017 et 2018, s’élève à 9 309 euros TTC. Le tout, au dire du commercial-prestataire, payable avec la subvention de fonctionnement puisque la seule chose imputable aux activités sociales était la boutique en ligne (avantage et bon plan) mais que celle-ci était offerte comme indiqué sur le contrat.
Sauf que non car à la réception de la première facture, le trésorier du comité qui avait signé le contrat s’aperçoit que celle-ci est libellée « abonnement Comitéo Loisirs. Forfait/entité : 3 ans » ». Il considère alors qu’il est en présence d’un abonnement de « loisirs », qui ne peut relever du budget de fonctionnement, alors qu’il avait bien précisé au prestataire que son intention était de souscrire un abonnement imputable au budget de fonctionnement et non au budget des activités sociales et culturelles.
Pour les juges, il y a eu des manœuvres dolosives de la part du prestataire :
La facture étant impayée, la société prestataire assigne le comité en paiement devant le tribunal. Le comité demande alors la nullité du contrat sur le fondement de l’article 1130 du Code civil en invoquant un vice du consentement. Le représentant du comité aurait été victime d’un dol, c’est-à-dire de manœuvres de la part du prestataire, sans lesquelles il n’aurait pas conclu le contrat.
Le juge a donné raison au comité en annulant le contrat car le prestataire de services a fait croire à la trésorière du comité, pour obtenir sa signature, que la dépense pouvait être affectée au budget de fonctionnement alors que cela n’était pas possible s’agissant de prestations relevant du budget affecté aux activités sociales de loisirs (TI Versailles, 1er fév. 2019, n° 11-18000.014, bis-2019-03-18-jugement_tribunal_dinstance_de_versailles-fonctionnement-asc).
Par ailleurs, les faits montraient bien que la possibilité d’imputer la totalité de la prestation sur le budget de fonctionnement avait été déterminante dans la décision du CE, représenté par sa trésorière, d’accepter de souscrire. Et c’est bien le prestataire qui avait convaincu la trésorière “d’accepter cette proposition de contrat au motif principal que celui-ci serait financé par le seul budget de fonctionnement, allant ainsi jusqu’à proposer la gratuité de la formule relevant du budget social et culturel”.
Enfin, quant à l’affirmation du prestataire selon laquelle le site était un outil de communication et relevait strictement du budget de fonctionnement, rien ne permettait de vérifier les fonctionnalités effectives du site.
D’où “l’existence de manœuvres dolosives ayant déterminé le consentement de Mme L…” et la confirmation de l’annulation du contrat et le rejet des demandes du prestataire tendant à obtenir “le paiement des factures, le paiement des indemnités contractuelles et de dommages-intérêts pour résistance abusive”.